
Planification d’expatriation des É.-U. – Les tenants et aboutissants de l’IRC 877A
Les quelques dernières années ont été plutôt mouvementées pour de nombreux contribuables américains (et fiscalistes), tout particulièrement pour ceux qui résident en dehors du pays. Tandis qu’un nombre surprenant de personnes des États-Unis sont encore aux prises avec des problèmes de conformité, de manière générale, la progression d’une possible expatriation était quelque peu prévisible pour les raisons suivantes :
- Régler la situation – Un nombre incalculable de citoyens américains et de titulaires de cartes vertes résidant au Canada ont essayé tant bien que mal de se conformer à ce qui, même dans des situations qui semblent simples, peut être un régime américain de déclaration à l’étranger extrêmement compliqué. Le traitement fiscal américain des fonds communs de placement canadiens, des régimes enregistrés d’épargne-études canadiens et des comptes d’épargne libre d’impôt canadiens (pour n’en nommer que quelques-uns) peut entraîner des tracas importants et parfois même de l’impôt aux États-Unis.
- Revoir la planification fiscale et successorale – Une fois conformes, les choses sérieuses commencent. Même des structures de planification fiscale et successorale canadienne «blanches comme neige» (par ex. des associations professionnelles, des fiducies familiales, des fiducies en faveur de soi-même, etc.) peuvent avoir d’importantes répercussions fiscales américaines défavorables et, au minimum, provoquer des exigences de conformité fiscale substantielles. Chaque entreprise ou fiducie ajoutée à une structure organisationnelle aggrave le niveau de complexité et les exigences de déclaration associées.
- Envisager l’expatriation – Pour certains contribuables américains résidant au Canada, surtout ceux n’ayant pas de liens historiques, philosophiques, personnels ou économiques importants avec les États-Unis, la possibilité de clarifier la complexité de tous les éléments susmentionnés en s’expatriant peut sembler très attirante.
Il n’est pas étonnant que le nombre d’Américains renonçant à la citoyenneté ait augmenté de 20% en 2015 jusqu’à 4300 personnes environ. Ce nombre peut être faible en apparence, mais dans de nombreuses villes, il faut parfois des mois pour obtenir un rendez-vous au consulat américain. Sans compter que les États-Unis ont augmenté les frais pour le traitement des renonciations de 422% jusqu’à 2350 $.
Pas si vite! L’essentiel des règles américaines d’expatriation (IRC 877A)
Alors que l’expatriation (par ex., renoncer à votre citoyenneté américaine ou à votre carte verte) semble constituer une «solution» facile à la complexité aggravée de la fiscalité transfrontalière, de la planification successorale et de la conformité, il peut y avoir des répercussions réelles, immédiates et importantes liées à la renonciation de votre citoyenneté ou à l’abandon de votre carte verte. Tous les contribuables américains pensant à l’expatriation devraient consulter attentivement les règles américaines d’expatriation (IRC 877A) puisqu’ils peuvent facilement y être assujettis et avoir de graves conséquences fiscales aux États-Unis.
À qui les règles s’appliquent-elles?
Les règles américaines d’expatriation s’appliquent à un «expatrié couvert»; quelqu’un qui s’expatrie et répond à n’importe quel critère objectif parmi les trois suivants:
- Critère de valeur nette – Le contribuable a une valeur nette au moment de l’expatriation de plus de 2 millions de dollars américains.
- Critère d’obligation fiscale – Le contribuable paye annuellement en moyenne un impôt sur le revenu de plus de 161000 $US.
- Critère de conformité – Le contribuable n’a pas rempli le formulaire 8854 certifiant qu’il s’est conformé à toutes ses obligations fiscales fédérales américaines pour les cinq années précédant l’année de l’expatriation.
Des exemptions aux critères de valeur nette et d’obligation fiscale peuvent s’appliquer à certains particuliers, nommément ceux nés avec une double citoyenneté et les particuliers qui s’expatrient avant l’âge de 18 ans et demi. Les deux exceptions exigent que ces particuliers aient résidé à l’extérieur des États-Unis durant une certaine période de temps avant l’expatriation.
Pour les biens nantis, le seuil de 2 millions de dollars américains est très faible. Ceci combiné aux répercussions sévères (ci-dessous) font en sorte que ces règles constituent un facteur dissuasif très important. Pour ceux qui ne se méfient pas, même avec des moyens modestes, ces règles peuvent avoir des conséquences préjudiciables importantes.
Quelles sont les répercussions?
En ce qui concerne les conséquences, les expatriés couverts sont assujettis à un ensemble de règles similaires, au moins en partie, aux règles fiscales canadiennes en cas de départ; toutefois, elles sont bien plus sévères et punitives. Les implications de base sont les suivantes:
- Impôt de départ – Le contribuable sera assujetti à une imposition immédiate sur tous les gains non réalisés et le revenu (toutefois, la première tranche de gains de 693000$US est exemptée). Des règles spéciales s’appliquent à la rémunération différée, à certains comptes d’impôts différés «déterminés» et intérêts dans des fiducies étrangères.
- Droit de mutation – Tout transfert futur par le contribuable à des personnes des États-Unis (de son vivant ou par suite d’un décès) est assujetti à un droit de mutation à un taux égal au taux d’imposition américain maximal de succession ou de don de 40%. Notez que cet impôt est perçu auprès du bénéfi ciaire du don ou du legs.
Que puis-je faire?
Il y a quelques techniques de planification de base que nous pouvons utiliser pour éviter l’application des règles américaines de l’expatriation:
Confirmer votre statut américain
Cela semble évident; toutefois, nous avons eu de nombreuses situations où les clients pensaient qu’ils étaient des contribuables américains, mais après une nouvelle consultation auprès d’un conseiller en immigration, ont découvert qu’ils ne l’étaient pas. Les avocats américains en immigration qui connaissent bien les règles devraient être en mesure de confi rmer avec une certitude relative si vous êtes citoyen américain ou titulaire de carte verte.
Prévoir votre expatriation
La valeur des biens et les taux de change peuvent fluctuer largement, et le seuil de valeur nette est libellé en dollars américains. Comme le billet vert est relativement fort par rapport au dollar canadien, c’est peut-être maintenant le bon moment pour envisager l’expatriation.
Si vous êtes titulaire d’une carte verte, il peut être possible aussi de prévoir votre expatriation afin d’éviter un statut de résident à long terme, ce qui constitue un prérequis additionnel au statut d’expatrié couvert pour les titulaires de carte verte. Les résidents à long terme sont des titulaires de carte verte qui ont été imposés à titre de résidents américains pour au moins huit années au cours des quinze années précédant l’expatriation.
Donner
Alors que les citoyens et résidents américains sont assujettis à un impôt américain sur les dons de biens internationaux, les exemptions sur les successions ou dons de son vivant sont relativement généreuses à 5,45 millions de dollars américains. Aussi, une personne peut donner jusqu’à 148000 $US à un conjoint non citoyen sans utiliser l’exemption pour crédit unifié. Il peut être possible de donner une partie ou la totalité de vos biens pour abaisser votre valeur nette sous le seuil de 2 millions de dollars américains. Naturellement, vous aurez besoin d’analyser les conséquences fiscales (et non fiscales) canadiennes et américaines avant d’envisager une telle stratégie.
Si vous êtes titulaire d’une carte verte et que vous résidez au Canada, vous ne serez peut-être pas assujetti aux règles fiscales américaines sur les successions et les dons relativement à vos biens internationaux. Seuls les citoyens et résidents américains sont assujettis à l’impôt américain sur les successions et les dons relativement à leurs biens internationaux. À cette fin, une personne peut donner ses biens en excès du montant de l’exemption sans être assujettie à l’impôt sur les dons.
Finalement, même si vous ne pouvez pas réduire votre valeur nette sous le seuil de 2 millions de dollars américains, vous pourriez possiblement réduire l’incidence des règles d’évaluation à la valeur du marché en donnant des biens à valeur accrue à une autre personne, comme votre conjoint.
S’aligner sur la fiscalité canadienne
Sans constituer un scénario idéal, si le statut d’expatrié couvert est inévitable et que l’impôt américain va être déclenché par les règles de l’expatriation, vous devriez, au minimum, vous aligner sur la fiscalité canadienne afin d’éviter l’éventualité d’une double imposition à l’avenir. Ceci est possible en déclenchant des réalisations concrètes avant l’expatriation ou en utilisant les accords préférentiels de la convention fi scale qui pourraient avoir un effet similaire.
Avant toute chose… Obtenez de l’aide!
La planification fiscale transfrontalière peut être très complexe et truffée de risques et d’incertitudes. À cette fin, tout contribuable américain envisageant l’expatriation devrait rechercher de l’aide auprès de conseillers passés maîtres dans ce domaine spécialisé de la fiscalité.