Planification d’héritage : sursis pour la transaction à pipeline ?

31 oct. 2017

Lorsque des particuliers meurent, ils sont réputés avoir disposé de tous leurs actifs à la juste valeur marchande avant de mourir. Ce postulat s’applique aux biens en immobilisation comme les propriétés de vacances, les biens locatifs et les actions de sociétés publiques ou privées, à l’exception de situations où la personne décédée est survécue par un conjoint. Les actifs peuvent, dans un tel cas, être transférés à l’époux survivant sans que cela entraîne de conséquences fiscales. En l’absence d’un époux survivant, tout revenu provenant de la disposition réputée sera inclus dans la déclaration d’impôt finale remplie au nom du défunt.

Double imposition

En vertu de la disposition réputée, la succession du défunt acquiert les actifs à un coût égal à leur valeur présumée au moment du décès. Lorsque la succession vend par la suite ces actifs, elle ne paie d’impôts que sur les produits très supérieurs à la juste valeur marchande au moment du décès; les actifs sont la plupart du temps vendus en temps opportun. Les actions de sociétés publiques sont en général faciles à vendre alors que les biens réels peuvent prendre davantage de temps. Mais c’est parfois difficile, voire impossible de trouver un acheteur pour des actions de société privée, surtout lorsqu’il s’agit d’actifs de placement comme les portefeuilles immobiliers ou boursiers. Si la société ne peut être vendue, la succession ne pourra exploiter sa valeur qu’en liquidant les actifs et en extrayant tout fonds resté dans la société. Le produit de la liquidation des actifs sera appelé à être traité comme un dividende par la succession et donnera lieu à une situation de double imposition du point de vue des actions de la société : 1. en tant que gain en capital sur la déclaration d’impôt finale du défunt 2. en tant que dividende sur la déclaration d’impôt de la succession.

Prenons l’exemple d’un particulier, en l’occurrence Donald, décédé en juin 2017. Donald était veuf et détenait, en plus de ses FERR et de ses comptes d’épargnes, la totalité des actions d’Holdco ; il avait utilisé Holdco au cours des années précédentes pour faire des affaires. La société fut éventuellement vendue et le produit net fut investi dans des actions et des CPG. Au décès de Donald, Holdco valait 550 000 $. Le coût initial des actions d’Holdco était nominal. Dans la déclaration de revenus finale de Donald, ses exécuteurs testamentaires ont déclaré un gain en capital de 550 000 $ en plus de ses FERR et d’autres revenus générés durant l’année. En Alberta (par exemple) l’impôt appliqué à un gain en capital peut atteindre jusqu’à 132 000 $. Lorsqu’Holdco sera liquidée et ses actifs de placement transférés à la succession, cette dernière devra payer environ 193 000 $ en impôts — en d’autres mots, une somme équivalente à presque 60 % de la valeur de la société.

L’exécuteur testamentaire a, à l’heure actuelle, deux options pour éviter cette situation de double imposition.

Choix accordé par le paragraphe 164 (6)

La première option consiste à liquider Holdco et à distribuer ses actifs aux bénéficiaires. En plus du dividende et des conséquences fiscales décrits ci-dessus, cette option entraînera une perte en capital de 550 000 $ pour la succession. Étant donné que les pertes en capital ne peuvent contrecarrer que les gains en capital, cette perte ne représente aucun avantage fiscal pour la succession. Cependant, si la liquidation d’Holdco se produit durant la première année de succession (c.-à-d. la première année suivant le décès de Donald), la succession peut utiliser le choix fiscal accordé par le paragraphe 164 (6) de la Loi de l’impôt sur le revenu, en l’occurrence, le report rétrospectif de la perte à la dernière déclaration de revenus de Donald dans le but de neutraliser le gain en capital déclaré précédemment et d’éviter une situation de double imposition.

La succession est cependant appelée dans ce scénario à traiter le produit de la liquidation des actifs d’Holco comme un dividende et de payer les impôts correspondants requis (le taux d’imposition des dividendes est à l’heure actuelle plus élevé que celui des gains en capital).

La transaction dite « à pipeline »

La deuxième option est communément appelée « transaction à pipeline » (pipeline transaction). Lors d’une transaction à pipeline, la succession transfère les actions d’Holdco dont elle est détentrice dans une autre société de capitaux (par ex., « Newco ») et reçoit, en échange et de la part de Newco, un billet à ordre d’une valeur égale à la valeur réputée d’Holdco au décès de Donald. S’il est bien structuré, le transfert ne devrait pas entraîner d’impôts. Holdco et Newco sont ensuite fusionnées et les actifs distribués aux bénéficiaires. Une obligation fiscale ne surviendra que si la valeur des actifs reçus est supérieure à la valeur réputée d’Holdco au moment du décès.

La transaction à pipeline permet d’éviter le dividende rencontré dans la première option (le choix fiscal proposé par le paragraphe 164 [6]). La valeur acquise d’Holdco continue cependant à être imposée comme un gain en capital dans la déclaration finale du défunt. Étant donné que le taux d’imposition des gains en capital est à l’heure actuelle moins élevé que celui des dividendes, la transaction à pipeline permet en conséquence à la succession de payer moins d’impôts.

L’Agence du revenu du Canada s’est montrée de nombreuses fois favorable à la transaction à pipeline. Elle exige généralement (entre autres choses) que les entreprises comme Holdco restent inchangées pendant au moins un an avant de fusionner avec des  entreprises comme Newco et de procéder au partage des actifs. Par conséquent, bien que la transaction à pipeline permette de réduire le fardeau fiscal de la succession, l’exécuteur testamentaire pourrait opter pour le choix fiscal proposé au paragraphe 164 (6) afin de pouvoir distribuer plus rapidement les actifs aux bénéficiaires.

Étant donné que la présentation ci-dessus ne contient qu’une description sommaire de la transaction à pipeline, vous devez procéder à un examen approfondi des dispositions techniques de la Loi de l’impôt sur le revenu avant d’employer cette stratégie. Les exécuteurs testamentaires sont, quant à eux, conseillés de consulter leurs conseillers professionnels.

Évènements récents

Le 18 juillet 2017, le ministre fédéral des Finances a proposé un certain nombre de nouvelles règles fiscales pour les sociétés privées, y compris une disposition visant à interdire l’emploi de la transaction à pipeline, jugeant pertinent le traitement des actifs reçus par une succession comme un dividende (voir l’exemple d’Holco ci-dessus). La double imposition redevient, par conséquent, applicable aux transactions à pipeline à compter du 18 juillet, sans qu’aucune autre échappatoire que le choix procuré par le paragraphe164 (6) soit possible.

Cependant, le 19 octobre 2017, le ministre a annoncé que le gouvernement ne procéderait pas à l’adoption des propositions concernant la conversion de revenus en gains en capital, y compris dans le cas des transactions à pipeline. Le gouvernement compte de plus réévaluer ces propositions en vue du rétablissement éventuel de certaines d’entre elles. Reste à voir si la transaction à pipeline sera de nouveau prise pour cible dans le futur.

Les successions ont semble-t-il toujours le droit d’utiliser cette option, mais impossible de savoir jusqu’à quand. Même si cette stratégie peut entraîner une baisse d’impôt, il est recommandé aux successions de chercher l’avis d’un professionnel. Veuillez prendre contact avec votre conseiller attitré auprès de Collins Barrow pour obtenir de l’assistance.

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