Tax Alert (words)

Marché du logement en essor + changement d’utilisation = impôts et absence de liquidités. Mais il y a une solution

Eric Gagnon 7 juin 2021

La plupart des Canadiens savent que la vente de leur maison n’entraînera normalement pas d’impôts sur le revenu en raison de l’exemption pour résidence principale (ERP). Malheureusement, les gens ont tendance à trop s’appuyer la connaissance de cette disposition et à se convaincre qu’ils n’auront jamais à se soucier de l’impôt lorsqu’ils vendront leur résidence principale.

Il existe toutefois un cas de figure souvent ignoré des propriétaires de biens résidentiels qui peut entraîner des fardeaux fiscaux imprévus : le changement d’utilisation. Selon le paragraphe 45 (1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR), lorsqu’un particulier arrête d’utiliser une propriété à des fins personnelles et commence à l’utiliser pour générer des revenus (ou vice versa), celui-ci sera réputé avoir disposé de ce bien à ce moment pour un produit égal à sa juste valeur marchande et l’avoir réacquis aussitôt après à un coût égal à cette valeur. Le principal sujet d’inquiétude dans ce genre de situation est que si le contribuable ne vend pas la propriété a un tiers, il n’aura pas les moyens de s’acquitter de la facture fiscale résultant de la disposition réputée.  

Plusieurs stratégies peuvent cependant être utilisées pour atténuer cette possible retombée. Mais avant d’en discuter, il serait utile d’examiner le concept à la base de l’exemption pour résidence principale. La discussion ne vise toutefois pas à faire un tour complet du sujet, mais de fournir la « toile de fond » nécessaire à la compréhension des règles dites de « changement d’utilisation » (présentées ci-dessous).

Exemption pour résidence principale

L’exemption pour résidence principale (ERP) peut réduire ou éliminer l’imposition du gain en capital obtenu sur la vente de la résidence principale d’un contribuable. Pour être admissible à l’ERP, le contribuable doit être propriétaire du bien (la propriété conjointe et la propriété bénéficiaire en vertu du droit commun sont aussi acceptables) et l’avoir habité (à un moment de l’année), ainsi que son conjoint ou ses enfants. Un contribuable ne peut désigner qu’un seul bien comme résidence principale par année d’imposition. Et une seule propriété peut être désignée comme résidence principale par unité familiale1 (et ce, depuis 1981).

En termes simples, tout gain obtenu sur la disposition d’une résidence sera exonéré de l’impôt pour les années d’imposition durant lesquelles ce bien était considéré (et était désigné) comme la résidence principale du contribuable. Si la propriété a été détenue pendant plus d’années que celles où cette désignation était de mise, une tranche proportionnelle du gain sera assujettie à l’impôt. Mais il existe aussi une règle (dite du « plus un ») permettant l’octroi d’une année d’exemption supplémentaire, par rapport notamment au nombre d’années pendant lesquelles le bien était détenu par le contribuable. Son but : assurer la disponibilité de l’ERP durant l’année au cours de laquelle le particulier a déménagé vers une nouvelle résidence principale (un fait qui a eu pour résultat de « créer » deux résidences principales dans une seule année).

À compter de 2016, même si la totalité du gain en capital généré par la vente est exonérée par l’ERP, la vente et la désignation du bien comme résidence principale devront être déclarées à l’Agence du revenu du Canada (ARC) durant l’année de la vente.

Changement d’utilisation (de l’emploi comme résidence principale à un autre emploi)

Lorsqu’un propriétaire quitte sa maison sans le vendre et choisit de la louer ou de l’utiliser à des fins commerciales, ce « changement d’utilisation » peut avoir des conséquences fiscales importantes et défavorables. Essentiellement, le contribuable sera réputé (sur le plan fiscal) avoir vendu le bien au moment où le changement d’utilisation a eu lieu. Et le prix de vente sera réputé être la juste valeur du bien au moment du changement de statut. Cette disposition réputée ne posera vraisemblablement pas de difficultés si l’ERP peut être utilisé pour protéger la totalité du gain de l’impôt. Mais ce n’est pas toujours possible. Si le contribuable possède une deuxième propriété (comme un chalet d’été) et l’a déjà désignée aux fins de l’ERP (ou compte le faire à l’avenir), une partie du gain pourrait devenir imposable.

Mais tout n’est pas perdu : le paragraphe 45 (2) de la LIR, qui est peu connu, a pensé à la situation. Celui-ci comprend essentiellement un choix fiscal permettant de reporter l’imposition du gain en capital jusqu’à l’année ou la vente aura vraiment lieu (à moins que le contribuable ne renonce à ce choix ou demande une déduction pour amortissement pour le bien)2.

Le choix doit être déposé auprès de l’ARC dans la déclaration de revenus de l’année au cours de laquelle le changement d’utilisation a eu lieu. Et il peut même être déposé après (sous réserve de la discrétion du ministre) dans certaines circonstances. Le choix présente aussi un autre avantage : le bien continuera à bénéficier du statut de résidence principale pendant quatre ans (au maximum) durant la période où il est assujetti au choix et même s’il ne répond pas techniquement aux critères établis. Cet avantage peut entraîner d’importantes économies d’impôt lors de la disposition éventuelle du bien.

Changement d’utilisation (conversion en résidence principale)

Le changement d’utilisation peut parfois aller dans l’autre sens ― lorsqu’un particulier décide par exemple d’emménager dans une propriété qu’il utilisait auparavant comme un bien locatif et d’en faire sa résidence principale. Il y a également disposition réputée dans ce genre de cas, car il sera considéré par la loi que le contribuable a vendu et racheté immédiatement le bien lors du changement d’utilisation. Par conséquent, tout gain accumulé sera immédiatement assujetti à l’impôt et ne sera pas couvert par l’ERP (puisqu’il s’agissait d’un bien locatif).

Le paragraphe 45 (3) peut toutefois aider, car il propose également un choix permettant le report de l’imposition du gain obtenu sur le bien jusqu’à l’année où la vente aura vraiment lieu (à moins, ici aussi, que le contribuable ne renonce à ce choix ou demande une déduction pour amortissement pour le bien). La date limite pour la production de ce choix est la même que celle de la déclaration de revenus de l’année réelle de la vente.

Tout comme le choix proposé par le paragraphe 45 (2), ce choix peut également prolonger l’octroi de l’ERP. Il permet notamment au contribuable de « regarder en arrière » sur une période de quatre ans (au maximum) lors de la désignation de la propriété comme résidence principale. Et comme pour le paragraphe 45 (2), le choix du paragraphe 45 (3) ne sera accordé que si la déduction pour amortissement n’a jamais été réclamée pour le bien.

Conclusion

Les conséquences fiscales liées aux changements d’utilisation sont trop souvent ignorées dans le cas des propriétés résidentielles, ce qui peut entraîner des fardeaux fiscaux imprévus dans le marché actuel de l’habitation, qui est en pleine effervescence. De nombreux facteurs et stratégies peuvent entrer en jeu. Les choix des paragraphes 45 (2) et 45 (3) ne sont que deux des aspects dont il faut tenir compte dans la planification fiscale effectuée pour les résidences principales. Les professionnels de Baker Tilly peuvent vous aider tout au long du processus.


  1. Folio de l’impôt sur le revenu S1-F3-C2, alinéa 2.13 : l’unité familiale comprend, en plus du contribuable, les personnes suivantes (le cas échéant) :
    • L’époux ou conjoint de fait du contribuable durant l’année, sauf si cet époux ou conjoint de fait a vécu à part toute l’année, en vertu d’une séparation judiciaire ou d’un accord de séparation écrit ;
    • Les enfants du contribuable, à l’exception de ceux qui étaient mariés, en union de fait ou âgés de 18 ans ou plus durant l’année.
    • Et si le contribuable n’était pas marié, en union de fait ou âgé de 18 ans ou plus au cours de l’année :
      • La mère et le père du contribuable ;
      • Les frères et sœurs du contribuable qui n’étaient pas mariés, en union de fait ou âgés de 18 ans ou plus durant l’année.
  2. Folio de l’impôt sur le revenu S1-F3-C2, alinéa 2.48 : si la déduction pour amortissement est réclamée pour la propriété, le choix sera réputé avoir été résilié le premier jour de l’année au cours de laquelle la demande (du choix) a été faite.

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