
La plupart des entreprises doivent payer des impôts sur tous leurs revenus dès l’année de leur création, y compris pour leurs comptes débiteurs et leurs stocks. Les entreprises agricoles constituent toutefois l’une des rares exceptions, car elles sont autorisées à payer leurs impôts selon la méthode de la comptabilité de caisse. Elles ont ainsi le droit de déduire les dépenses payées d’avance et de reporter l’imposition de leurs revenus aux années qui suivront. Et elles peuvent attendre que leurs stocks soient vendus avant de payer des impôts sur ceux-ci. Mais les reports ne sont pas toujours la meilleure option, même si la plupart des agriculteurs préfèrent en profiter.
Ce qui ne va pas avec les reports d’impôt
Pour la plupart des entreprises, cela peut sembler bête de payer des impôts lorsque l’on n’est pas obligé de le faire. Mais un report ne fera rien de plus que de différer le paiement de la charge fiscale dans le cas des entreprises agricoles. À court terme, l’agriculteur qui choisit de reporter le paiement de ses impôts aura probablement l’impression de s’en être débarrassé, mais il ne devra pas moins s’acquitter de sa dette fiscale une fois ses stocks vendus. Certains des agriculteurs qui gèrent leurs exploitations comme des entreprises personnelles non constituées en société ou des sociétés en nom collectif croient aussi à tort qu’il est préférable de reporter le paiement de leurs impôts aussi souvent que possible. Mais le paiement des sommes dues en petites tranches ne comporte pas moins des avantages importants. Cela leur permettra tout d’abord de figurer dans des tranches d’imposition inférieures (en général, je conseille moi-même à mes clients agriculteurs de payer des impôts dans des tranches d’imposition inférieures chaque année). Et il n’y a aucune raison de retarder le processus de paiement (même si le reste de l’impôt pourra être différé), car les stocks imposables s’accumuleront et finiront par faire passer le propriétaire de l’exploitation dans des tranches d’imposition plus élevées ― ce qui peut poser un problème important au fur et à mesure que la dette fiscale augmentera, jusqu’à possiblement atteindre des niveaux ingérables.
L’impôt sur les gains en capital : quel avenir ?
Les politiciens et les décideurs sont en train de spéculer sur une augmentation du taux d’imposition des gains en capital dans les années à venir, car le gouvernement est en train d’enregistrer d’importants déficits. À l’heure actuelle, les gains en capital ne sont imposables qu’à 50 %, ce qui signifie que l’autre moitié est exonérée d’impôts. Lorsque le taux d’inclusion augmentera, ce taux pourrait passer à 75 %, voire 100 %. Si vous déclenchez un gain en capital dès maintenant — en vendant ou en transférant par exemple un bien agricole dans une société d’affaires — vous pourrez éviter l’imposition de ce gain à un taux d’inclusion plus élevé dans le futur. Les agriculteurs sont tous admissibles à l’exonération des gains en capital à l’heure actuelle, qui vous permettra, le cas échéant, de mettre à l’abri des gains en capital pouvant aller jusqu’à un million de dollars (à condition que ce soit des biens agricoles admissibles). Ce serait donc judicieux d’utiliser cette exemption dès maintenant, plutôt que de la « conserver » pour plus tard, car certains changements pourraient la rendre moins attrayante ou la faire disparaître dans le futur.
Les meilleures circonstances pour reporter l’impôt
J’essaie régulièrement de convaincre nombre des clients qui possèdent des stocks importants (qui deviendront un jour imposables) de payer leurs impôts à des taux peu élevés chaque année, plutôt que de les reporter et de les payer dans des tranches plus élevées plus tard. Mais il convient de noter qu’il existe aussi des situations où le report est préférable. Si votre plan de relève ne comprend que le transfert de votre exploitation à un membre de la famille et vous ne prévoyez pas de vendre une partie de l’opération, vous n’aurez pas à vous soucier d’économies sur des gains en capital. Cela vaut aussi la peine de songer à des prestations fondées sur le revenu comme l’Allocation canadienne pour enfants (ACE), qui est basée sur le revenu familial. Si vous fixez votre revenu à un niveau supérieur à ce qu’il devrait être, vous risquez toutefois de ne pas être admissible à certaines prestations. Ces questions (ainsi que d’autres) à l’esprit, chaque famille devra aussi tenir compte des complications soulevées par leur propre situation ― la possibilité par exemple qu’un report d’impôt ne soit pas l’option la plus rentable pour leur entreprise.