
Changements fondamentaux aux règles en matière de successions et testaments
Des modifications récentes à la Loi de l’impôt sur le revenu ont apporté des changements fondamentaux aux règles fiscales pour les successions et testaments. Les avocats et les fiduciaires devraient se familiariser avec ces nouveaux aspects.
De manière générale, tous les revenus de fiducies sont imposés au taux d’imposition des particuliers le plus élevé d’environ 54 %. Il y a quelques exceptions à la règle de taux d’imposition maximal. Actuellement, la nouvelle législation déplace le fardeau fiscal d’une fiducie de conjoint à la succession du conjoint survivant. Heureusement toutefois, il semble que ces dispositions seront annulées, tel que c’est expliqué ci-dessous.
Taux d’imposition maximal pour les fiducies
Auparavant, les fiducies testamentaires étaient imposées à des taux progressifs : la première tranche de 40 000 $ de revenus était imposée à environ 20 %, la tranche suivante de 30 000 $ à environ 32 %, et ce taux augmentait ensuite à environ 50 % quand le revenu excédait 220 000 $. À compter du 1er janvier 2016, toutes les fiducies seront imposées au taux maximal de 54 %. Il y a deux exceptions : 1) la succession du défunt pour les 36 premiers mois (appelée succession imposée à taux progressif); et 2) une fiducie par année pour un particulier qui est admissible au crédit d’impôt pour personnes handicapées (appelée fiducie admissible pour personne handicapée).
Exceptions à la règle de taux maximal pour les fiducies admissibles pour personnes handicapées
Les règles des fiducies admissibles pour personnes handicapées sont complexes. Même si les nouvelles règles gardent un taux progressif pour les fiducies admissibles pour personnes handicapées, les économies fiscales accumulées produites par le faible taux d’imposition pendant un certain nombre d’années sont assujetties à un nouvel impôt qui effectivement « récupère » ces économies lorsque la personne handicapée décède ou cesse d’être admissible au crédit d’impôt pour personne handicapée. Afin de réaliser les économies, le revenu doit être distribué au bénéficiaire handicapé avant l’année du décès. Ceci exigera une gestion attentive de la part des fiduciaires dans les cas où des prestations provinciales sont reçues.
Règles relatives aux successions imposées à taux progressif
Une succession admissible doit se désigner elle-même à titre de succession imposée à taux progressif. Si la succession cesse d’être admissible à titre de succession imposée à taux progressif, elle perd ce statut. Par conséquent, les crédits pour dons de charité et déductions pour pertes de la succession peuvent être perdus, et le taux d’imposition maximal s’appliquera. Ceci peut avoir des conséquences sérieuses pour la succession et dans certains cas peut entraîner une double imposition, en particulier quand les actions d’une société privée sont détenues par la succession. Une succession imposée à taux progressif peut perdre son statut avant 36 mois si la succession reçoit des contributions de personnes autres que le défunt, notamment certains prêts ou certaines garanties de prêts effectués par des personnes ayant un lien de dépendance.
Doubles testaments
Les doubles testaments pour les sociétés privées sont maintenant communs. L’Agence du revenu du Canada a indiqué qu’elle a l’intention de traiter ce qui est souvent désigné comme successions primaires et secondaires dans ces doubles testaments comme une succession à taux progressif. À titre de précaution, il est recommandé de traiter ce problème de manière particulière dans le testament pour indiquer l’intention d’orienter le fiduciaire de la succession afin de désigner les deux successions comme étant une succession imposée à taux progressif. Il est également prudent de nommer la ou les mêmes personnes en tant que fiduciaire testamentaire des deux successions.
Éventuelle annulation des changements aux dispositions d’imposition
Le ministère des Finances a déposé un avant-projet de loi en janvier qui annule effectivement les nouvelles dispositions transférant le fardeau fiscal lors du décès d’un conjoint survivant d’une fiducie de conjoint à la succession du conjoint survivant. La législation antérieure, entrée en vigueur le 1er janvier 2016, laisse les bénéficiaires de la fiducie de conjoint avec un gain fortuit, puisque l’impôt ordinairement payable sur les actifs de la fiducie de conjoint devient payable par la succession du conjoint survivant, au détriment des bénéficiaires de la succession du conjoint survivant. Heureusement, il semble que cette disposition sera éliminée, puisqu’elle a causé des problèmes importants, tout particulièrement dans les familles d’un second mariage.
Révision des testaments existants
Il n’y a pas de dispositions de « droits acquis » pour protéger les fiducies existantes contre ces changements. Par conséquent, c’est maintenant le bon moment de revoir les testaments des clients et les dispositions créant ces fiducies. Chaque fiducie devrait être examinée avec attention. Dans certains cas, les fiduciaires sont tenus de continuer les fiducies. Dans d’autres cas, les fiduciaires devraient considérer des distributions à un bénéficiaire ou plus après avoir obtenu un avis juridique.
Les fiducies demeurent utiles dans de nombreux cas. Des économies fiscales importantes sont encore possibles quand les fiduciaires ont le pouvoir discrétionnaire d’allouer des revenus imposables aux bénéficiaires ayant les taux d’imposition les plus faibles. Une fiducie peut aussi protéger un héritage contre des réclamations de créanciers et peut-être des réclamations matrimoniales. Dans d’autres cas, on accordera la préférence à une simplification du testament pour éliminer la complexité des fiducies.