Modifications fiscales proposées pour les sociétés agricoles familiales

26 sept. 2017

Le 18 juillet 2017, le ministre des Finances Bill Morneau a proposé des changements complets à l’imposition des sociétés privées, reposant sur des préoccupations selon lesquelles des sociétés privées « donnent des avantages fiscaux inéquitables à certains particuliers – souvent à revenus élevés ». Bien que les modifications proposées toucheront toutes les sociétés privées, plusieurs d’entre elles vont avoir une incidence significative sur la planification fiscale des sociétés agricoles familiales et sur les transferts de biens agricoles entre générations (par ex., la terre, les parts de la société ou une participation dans une société de personnes agricole familiale).

Les changements ciblent trois stratégies importantes de planification actuellement utilisées par de nombreuses sociétés agricoles familiales :

  1. le saupoudrage du revenu;
  2. la multiplication de la déduction pour gains en capital; et
  3. les investissements passifs.

La période de consultation, en ce qui concerne ce projet de loi, prend fin le 2 octobre 2017, date au-delà de laquelle le projet de loi définitif sera déposé.

Saupoudrage du revenu

Actuellement, les sociétés agricoles familiales peuvent transférer le revenu d’un seul agriculteur qui pourrait être dans une tranche d’imposition plus élevée que celles des membres de la famille qui se trouvent dans les tranches d’imposition les plus faibles ou dont le revenu pourrait ne pas être imposable du tout. Comparons par exemple l’imposition d’un agriculteur qui n’est pas constitué en société à l’imposition d’une société agricole familiale où les conjoints sont actionnaires. Présumons que seul l’agriculteur s’occupe activement des opérations quotidiennes de la ferme et que l’agriculteur et son conjoint (ou sa conjointe) n’ont aucune autre source de revenus.

  Agriculteur non constitué en société Société agricole familiale
Revenu brut 250 000 $ 250 000 $
Impôt des sociétés (taux combiné de 15 %) S/O (37 500 $)
Fonds imposables pour le particulier (les particuliers) 250 000 $ 212 500 $
Imposition des particuliers* (94 000 $) (35 500 $)
Revenu net après impôt 156 000 $ 177 000 $

* Selon les taux d’imposition des particuliers en Ontario en vigueur en 2017 et en présumant que les distributions effectuées par la société agricole familiale sont partagées à parts égales (50/50) entre l’agriculteur et son conjoint ou sa conjointe sous forme de dividendes.

L’agriculteur en situation de société agricole familiale paye 21 000 $ de moins en impôt. Le ministère des Finances a jugé que cette économie constitue un « avantage fiscal inéquitable ». Par conséquent, à compter du 1er janvier 2018, une proposition de « critère du caractère raisonnable » s’appliquera aux sources communes de distributions de revenus agricoles (par ex., les salaires, les revenus d’une société de personnes et les revenus de dividendes). Ce critère sera largement basé sur les contributions que le bénéficiaire du revenu a effectuées dans l’entreprise sous forme de main d’œuvre ou de capital, et s’il a assumé un quelconque risque. Si le revenu reçu n’est pas proportionnel aux contributions effectuées ou au risque assumé par le bénéficiaire (en plus d’autres critères), le revenu pourrait être jugé « déraisonnable » et être imposé au taux marginal le plus élevé de 50 % approximativement.

Multiplier la déduction pour gains en capital

Actuellement, jusqu’à 1 million de dollars de gains en capital réalisés sur un bien agricole admissible (qui comprend la terre agricole admissible, les actions admissibles d’une société agricole familiale, les participations admissibles dans des sociétés de personnes en agriculture et les quotas) peut être réalisé à l’abri de l’impôt en utilisant l’exemption pour gains en capital d’un particulier. Pour réduire l’impôt au minimum sur les dispositions d’un bien agricole admissible, la planification fiscale pour les fermes a souvent inclus l’utilisation de l’exemption pour gains en capital de différents membres de la famille, multipliant ainsi le million de dollars disponible par le nombre de membres de la famille propriétaires du bien agricole admissible.

Pour contrecarrer ce genre de planification, le ministère des Finances a proposé que les enfants âgés de moins de 18 ans ne puissent pas demander une déduction pour gains en capital sur la disposition de tout bien, notamment un bien agricole admissible. De plus, les propositions prévoient une disposition pour que les enfants âgés de 18 ans ou plus ne puissent pas non plus demander une déduction pour gains en capital pour toute augmentation en valeur d’un bien agricole admissible qui a été réalisée avant leur 18e anniversaire. Pour se conformer à cette exigence, les agriculteurs devront obtenir et retenir des renseignements pour prouver la valeur du bien au moment où chaque enfant atteint l’âge de 18 ans.

Dans la planification fiscale actuelle d’une ferme, on devrait envisager l’utilisation de la déduction pour gains en capital de l’agriculteur sur l’augmentation de la valeur du bien jusqu’à la date où l’enfant atteint l’âge de 18 ans, puisque l’enfant sera incapable d’utiliser sa déduction pour gains en capital sur cette partie du gain en capital, peu importe son âge. Les planifications fiscales précédentes où des fiducies familiales étaient utilisées devraient également être réexaminées, puisque tous les gains en capital alloués à partir d’une fiducie familiale ne seront plus admissibles à la déduction pour gains en capital en vertu des nouvelles propositions.

Pour compliquer les choses davantage, le ministère des Finances a également proposé un contrôle du caractère raisonnable pour les gains en capital réalisés sur les participations dans des sociétés de personnes et sur les actions des sociétés agricoles familiales. (Le contrôle comprendra un critère similaire à celui du critère de caractère raisonnable abordé ci-dessus concernant le « saupoudrage de revenus ».) Le critère de caractère raisonnable sera bien plus exigeant pour les particuliers âgés de 18 à 24 ans. Les portions de tout gain réputé être déraisonnables seront imposées au taux d’imposition marginal le plus élevé de 50 % approximativement.

Choix proposé en 2018

Les agriculteurs qui ont déposé une déclaration de revenus des particuliers en 1994 peuvent se rappeler que le choix de 1994 relatif aux gains en capital a été institué lorsque l’exemption générale pour gains en capital de 100 000 $ sur la plupart des actifs a été abrogée. Ce choix unique permettait aux contribuables de « rajuster à la hausse » le coût aux fins de l’impôt d’un bien de 100 000 $, réduisant le futur gain en capital devant être réalisé sur ce bien de 100 000 $.

Une mesure similaire a été proposée pour 2018 en raison des changements planifiés à l’admissibilité d’un bien agricole qualifié à l’exemption pour gains en capital. Un particulier, incluant un enfant, peut choisir d’utiliser sa déduction pour gains en capital sur certains biens agricoles, en utilisant les règles fiscales actuelles, garantissant ainsi qu’une disposition future du bien entraînera une obligation fiscale future réduite. Les adultes peuvent choisir d’utiliser la déduction pour gains en capital sur les trois types de biens agricoles admissibles, mais les enfants de moins de 18 ans peuvent choisir uniquement d’utiliser leur déduction pour gains en capital sur la terre agricole et les participations à une société de personnes, pas sur les parts d’une société agricole familiale.

Une certaine planification fiscale importante doit être effectuée avant de faire ce choix, puisque les gains en capital peuvent entraîner de l’impôt minimum de remplacement (IMR), qui peut être aussi élevé que 56 600 $ pour un résident de l’Ontario n’ayant aucun autre revenu. L’IMR est remboursable en fonction de futurs impôts des particuliers dus au cours des sept années suivantes, mais certains particuliers, précisément les enfants, peuvent ne pas générer suffisamment de revenus personnels et d’impôts reliés durant cette période afin de récupérer la totalité du montant d’IMR payé.

Un « piège fiscal » supplémentaire survient si n’importe quel bien agricole utilisé pour un choix a été transféré au particulier après le 31 décembre 2015, en vertu des règles de transfert de ferme existantes. En vertu de la législation actuelle, le gain choisi va revenir à l’auteur du transfert original du bien agricole. Si l’auteur du transfert n’a pas suffisamment de déduction de gains en capital restante, le gain choisi en 2018 par le destinataire du transfert entraînera une responsabilité fiscale importante pour l’auteur du transfert.

Investissements passifs

De nombreuses sociétés agricoles familiales retiennent des excédents de rémunération, plutôt que de payer les fonds accumulés aux actionnaires, différant ainsi l’application des taux d’imposition aux particuliers les plus élevés. Au lieu de cela, les fonds retenus sont investis dans des investissements passifs au sein des sociétés agricoles familiales, comme des stocks ou des CPG. Le ministère des Finances propose d’imposer le revenu de placement gagné sur ces investissements passifs à des taux d’imposition des sociétés nettement plus élevés pour encourager les actionnaires à retirer les fonds des sociétés agricoles familiales et à payer de l’impôt personnellement sur les investissements.

La législation proposée pour éliminer les avantages fiscaux perçus comme injustes du ministère des Finances va avoir une incidence substantielle sur les futures planifications de toutes les fermes familiales. Afin d’éviter toutes les conséquences fiscales négatives que cela comporte, il est important de discuter des effets des changements proposés avec votre expert-comptable.

Katherine Lamont, CPA, CA, est directrice, fiscalité, au cabinet Collins Barrow de Red Deer

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