Modifications proposées à l’imposition des sociétés privées et de leurs actionnaires

Bill Crowther 22 nov. 2017

Le 18 juillet 2017, le gouvernement fédéral du Canada a présenté des propositions (« annonces ») visant à restreindre l’emploi de sociétés privées dans le but d’obtenir plus d’avantages fiscaux que des particuliers qui ne peuvent agir de même. Les mesures proposées à cet effet par le gouvernement ont pour objet de faire payer leur juste part aux riches et de rendre le régime fiscal canadien plus équitable pour tous les Canadiens. Si elles sont adoptées tel que déposées, ces propositions représenteront sans doute la plus importante modification à l’imposition des sociétés privées depuis plus de 40 ans.

Le gouvernement a fort heureusement retiré certaines de ces propositions, tout en signalant son intention d’adopter quelques-unes d’entre elles. Comme le ministère des Finances a publié un grand nombre de communiqués en octobre et en novembre, nous avons cru utile de résumer les intentions du gouvernement et d’examiner l’état actuel de la situation. Nous disons « actuel », car les nouvelles mesures ne pourront être adoptées de façon convenable (c.-à-d., d’une manière à permettre aux contribuables de s’y conformer comme il se doit) qu’après qu’un bon nombre de choses aient été clarifiées et que de nombreuses dispositions fiscales viables aient été rédigées.

Les contribuables doivent envisager certaines planifications en 2017, en l’occurrence, déterminer si des changements sont requis au niveau de leur structure salariale et de la structure de leur capital social après l’établissement des règles définitives. Les conseillers de Collins Barrow peuvent les guider dans ce processus.

Quelles étaient les intentions ?

Dans le budget de 2017 (mars), le gouvernement avait annoncé une révision des stratégies de planification fiscale ayant recours aux sociétés privées. Particulièrement, les stratégies suivantes :

  1. La répartition de revenus entre des personnes apparentées dans le but de réduire la charge fiscale de ces revenus.
     
  2. La conversion de revenus (souvent des dividendes) en gains en capital, qui sont habituellement imposés à un taux très inférieur à celui appliqué aux revenus réguliers et aux dividendes ; et
     
  3. La détention de placements passifs dans une société privée en lieu et place de portefeuilles de placement personnels.

Les documents budgétaires ont indiqué qu’un document de consultation sur ces sujets sera publié sous peu.

Quel était le contenu de ces propositions ?

Ces propositions avaient trait à quatre points particuliers :

  1. La répartition du revenu dans un contexte familial : La proposition concernée avait pour but d’éliminer des stratégies de planification axées sur le transfert (et l’imposition subséquente à un taux inférieur) des revenus d’un fondateur/parent à des membres de famille adultes appartenant à des tranches d’imposition inférieures et non impliqués dans les activités de la société. Les règles actuelles stipulent que tout revenu obtenu par une personne mineure de la part d’une personne apparentée doit être imposé au taux marginal maximal − un impôt notamment connu sous le nom d’« impôt des enfants ». Le gouvernement comptait, en vertu des nouvelles propositions, élargir la portée de cet impôt afin d’inclure non seulement les mineurs, mais aussi toute personne adulte dont le revenu est lié de manière suffisante à une entreprise dirigée (ou grandement influencée) par une personne apparentée ; les règles élargies ne seront cependant pas applicables si le revenu perçu est jugé « raisonnable », parcequ’accordé, par exemple, en contrepartie de travaux ou de capitaux investis dans l’entreprise. Des tests de vraisemblance à plusieurs niveaux ont, à cet effet, été aussi proposés pour aider à mieux évaluer ces cas.
     
  2. Les restrictions sur l’usage multiple de l’exonération cumulative des gains en capital (ECGC) : Les propositions visaient aussi à empêcher des membres de famille non impliqués dans les activités d’une entreprise d’accéder tous à la fois à l’ECGC après la vente d’actifs admissibles (actions de petites entreprises admissibles et actifs admissibles appartenant aux secteurs agricoles et de la pêche). La capacité à réaliser des gains en capital provenant de fiducies, lesquels peuvent être abrités par l’ECGC, a aussi été éliminée, même dans les cas où le bénéficiaire est impliqué dans les activités de l’entreprise. Il convient de noter que le régime fiscal actuel est peu équipé pour empêcher la multiplication des gains relatifs à l’ECGC parmi les membres d’une même famille.
     
  3. La conversion de dividendes en gain en capital : Le gouvernement a aussi inclus dans l’avant-projet de loi une règle à l’encontre du dépouillement des surplus de société. Cette règle a notamment pour but de proscrire l’usage de plans fiscaux axés sur l’extraction et le traitement (dans un contexte familial) de certaines sommes comme des gains en capital et non comme des dividendes imposables. En Ontario, le taux d’imposition maximal des dividendes imposables était généralement de 45,3 % ou de 39,34 % (en 2017) pour les particuliers. Le taux d’imposition des gains en capital était, quant à lui, de 26, 765 %. Les économies réalisées grâce à ce genre de planification sont en conséquence significatives (18,5 % ou 12,6 %) lorsque l’ARC ne réussit pas à évaluer les transactions concernées d’une autre manière.
     
  4. Les avantages fiscaux présumés des placements passifs détenus dans des sociétés privées : Les propositions concernées avaient principalement pour objet de lancer un débat théorique sur la manière d’éliminer ce genre davantage. Le gouvernement est en l’occurrence foncièrement préoccupé par le fait que les sociétés de capitaux sont à l’heure actuelle imposées à un taux très inférieur en surface à celui imposé aux particuliers, en ce qui concerne les revenus de société. Lorsqu’une société de capitaux distribue des revenus nets (après impôts) sous forme de dividendes à ses actionnaires individuels, les montants concernés ne peuvent échapper à l’impôt, car ces actionnaires doivent payer la taxe des particuliers sur les dividendes reçus. (Voilà pourquoi nous disons « en surface ».)

Les possibilités de report d’impôt (notamment de la part de ces sociétés) ne demeurent pas moins le facteur le plus préoccupant pour le gouvernement. Prenons cet exemple : en 2017, le taux maximal imposé aux particuliers (pour des revenus d’entreprise) était de 53,53 % en Ontario. Pour chaque tranche de 100 $, il restait donc à chaque personne 46,47 $ à investir. La même année, les sociétés privées étaient quant à elles assujetties à des taux de 15 ou de 26,5 % dans cette province. Pour chaque tranche de 100 $, il restait donc à chaque société soit 85 $, soit 73,50 $ à investir. Le montant d’un report éventuel (y compris pour d’autres sommes prêtes à être investies) pouvait donc être de l’ordre de 38,53 $ ou de 27,03 $ pour chaque tranche de 100 $. C’est donc plus avantageux pour chaque propriétaire d’investir le gros du bassin d’investissement dans la société elle-même. L’avantage financier généré par les reports est par conséquent ce qui inquiète le plus le gouvernement. Les propositions contiennent dans l’ensemble des mesures pour supprimer cet avantage perçu, notamment par l’intermédiaire d’impôts supplémentaires.

Le gouvernement a aussi annoncé la tenue d’une période de consultation de 75 jours pour recueillir des commentaires sur ces propositions.

Qu’est-il arrivé entre le 18 juillet 2017 et le 2 octobre 2017 ?

Les annonces étaient plus qu’un simple « exercice de consultation » ou une simple « proposition » dans le cas des trois premiers volets, puisqu’elles étaient aussi accompagnées d’un avant-projet de loi très complexe (des dispositions législatives s’étendant sur 23 pages accompagnées de notes explicatives s’étendant sur 47 pages). Les dispositions relatives à la restriction de la répartition du revenu et de l’ECGC devaient entrer en vigueur le premier janvier 2018. Même si les règles relatives à la conversion de revenus en gains en capital devaient entrer en vigueur le 18 juillet, leur application était prévue pour être rétroactive dans plusieurs cas. Mais comme il fut démontré par la suite, cet avant-projet de loi aurait eu des conséquences imprévues s’il avait été adopté tel quel. Quant au quatrième volet, qui concerne notamment les placements passifs, les concepts en jeu étaient non seulement très complexes, mais avaient aussi été traités de manière incomplète, ce qui a donné lieu à de grandes inquiétudes.

Le gouvernement a reçu plus de 21 000 soumissions de la part du monde des affaires canadien et des conseillers fiscaux lors de l’exercice de consultation. Ces soumissions étaient axées sur les nombreuses conséquences imprévues et les problèmes liés à la gestion des propositions présentées par les autorités.

Qu’a-t-on abandonné et où en sommes-nous maintenant ?

Le gouvernement a affirmé avoir accordé une oreille attentive aux soumissions ainsi qu’aux points soulevés lors des discussions entamées avec les Canadiens à travers le pays durant cette période et a confirmé par l’intermédiaire de publications émises durant la deuxième moitié d’octobre 2017 avoir :

  1. Abandonné les propositions visant à appliquer des restrictions à l’ECGC.
     
  2. Abandonné les propositions relatives à la conversion de revenus en gains en capital.
     
  3. Confirmé son intention d’adopter les règles visant à éliminer la répartition de revenus entre des membres de famille ne fournissant pas d’apports raisonnables en travail ou en capital à l’entreprise. Cependant, le gouvernement a aussi annoncé la revue prochaine des règles proposées dans le but de les rendre plus abordables et plus pratiques. La prochaine série de mesures législatives est prévue pour l’automne 2017. Il reste toutefois à déterminer si les nouvelles règles seront moins complexes et assez fiables pour être appliquées avec équité.
     
  4. Confirmé son intention de trouver une méthode pour éliminer les avantages fiscaux présumés des reports effectués en vertu de revenus de société privée. Cependant, le gouvernement a aussi tenu à préciser que les placements déjà existants lors de l’entrée en vigueur des nouvelles règles ne seront pas affectés et continueront à être imposés sous le régime d’impôt sur le revenu actuel. De plus, le gouvernement a annoncé que la toute première tranche de 50 000 $ de tout revenu de placement sera assujettie au régime actuel et que les montants ayant dépassé ce seuil seront seuls assujettis au nouveau régime. Les questions et les inquiétudes (notamment celles soulevées par le monde de la fiscalité) restées en suspens après la publication de ces annonces sont néanmoins significatives et de surcroît trop nombreuses pour être mentionnées ici. Le gouvernement a cependant indiqué que le budget fédéral de 2018 procurera plus de détails sur la façon dont le gouvernement compte procéder. En ce qui concerne les révisions des propositions sur l’impôt des enfants, il faudra définitivement attendre et voir.

Bill Crowther, CPA, CA, TEP, FEA, occupe le poste d’associé en fiscalité au bureau de Peterborough de Collins Barrow.​

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