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Fonds communs établis en vertu de IRF : soyez prudents !

Tony Alberton 17 sept. 2018

Dans nos alertes fiscales récentes, nous avons discuté de l’impôt sur le revenu fractionné (IRF), qui a pour but de décourager l’usage de techniques de fractionnement de revenu au moyen de sociétés privées, par l’imposition des sommes reçues au taux marginal le plus élevé. Les règles établies dans le cadre de cet impôt sont complexes et l’Agence du revenu du Canada (ARC) n’a, à ce jour, fourni que peu d’éclaircissements sur leur application.

Dans un document d’interprétation technique récent (le 2018-0761601E5), l’ARC a pris comme exemple une société exploitant séparément deux secteurs d’activité distincts. Le conjoint du propriétaire de cette entreprise travaille 25 heures par semaine pour l’un des deux secteurs, en l’occurrence, celui dédié à la gestion immobilière et ne participe en aucune façon aux activités de l’autre secteur, qui est dédié à la construction. L’ARC a été appelée à préciser comment l’exception dite de « l’entreprise exclue » aux règles de l’IRF pourrait être appliquée aux versements faits au conjoint dans ce genre de cas.

Pour pouvoir bénéficier de cette exception, une personne doit avoir pris une part active, régulière, continue et conséquente aux activités d’une entreprise, que ce soit durant l’année en cours ou durant l’une des cinq années précédentes. Il existe en l’occurrence une règle de présomption (le critère dit de « démarcation nette ») selon laquelle une personne doit travailler en moyenne 20 heures par semaine durant la partie de l’année où l’entreprise était en activité. Si l’exception est applicable dans son cas, l’individu ne sera pas assujetti au taux marginal le plus élevé pour tout revenu perçu de l’entreprise.

Dans le document d’interprétation susmentionné, l’ARC était d’avis que tout revenu provenant directement ou indirectement des activités de gestion immobilière de l’entreprise (et versé au conjoint) — en d’autres mots, le secteur d’activité auquel il participe activement — devrait être traité comme un revenu « d’entreprise exclue » et donc exonéré de l’IRF. Le cas échéant, aucun des revenus provenant des activités de construction de l’entreprise (et versé au conjoint) ne sera admissible à cette exception et exonéré de l’IRF, à moins qu’une autre exception ne soit applicable. L’ARC a indiqué que les deux secteurs de l’entreprise devront avoir leur propre comptabilité afin de permettre aux autorités d’identifier comme il se doit la provenance de tels revenus.

Même si les conseils de l’ARC sur l’application des règles de l’IRF sont les bienvenus, l’obligation de tenir une comptabilité séparée pour chaque secteur d’activité ne fera qu’alourdir le fardeau déjà pesant des propriétaires d’entreprises constituées en société en matière d’obligations fiscales. Les propriétaires de sociétés d’affaires constituées de plus d’une entreprise qui comptent profiter de l’exception de l’entreprise exclue (voir plus haut) doivent réfléchir soigneusement à la manière de répartir leurs coûts indirects et leurs autres dépenses entre chacun de leurs secteurs d’activité et tenir compte du fait que leurs choix pourraient être contestés par l’ARC. Les propriétaires sont également requis de tenir des registres adéquats pour prouver leur admissibilité à l’exception de l’entreprise exclue, par exemple, des feuilles de temps, des calendriers ou des journaux de bord suffisamment détaillés pour établir le nombre d’heures travaillées par une personne au cours d’une année donnée.

Les propriétaires d’entreprise continuent, malgré ces conseils, à être rongés par l’incertitude. L’interprétation fournie par l’ARC a été rédigée dans le contexte d’une société d’affaires unique composée de deux exploitations séparées. Quant à la question de savoir si un contribuable est oui ou non en train d’exploiter plus d’une affaire à la fois, le bulletin d’interprétation archivée IT-206R de l’ARC explique que tout dépend « du degré de corrélation, d’entrelacement ou d’interdépendance et de la mesure de l’unité touchant l’exploitation ». Il ne semble donc pas y avoir de critère de démarcation nette pour résoudre la question.

De plus, l’ARC n’a pas pleinement expliqué si l’IRF est applicable et comment, le cas échéant, à des dividendes versés au conjoint dans ces circonstances. Une fois le résultat comptable des deux exploitations obtenu, le revenu annuel provenant des activités de gestion immobilière est-il cotisé dans un fonds commun accumulable — et utilisable à tout moment — afin d’éviter l’application de l’IRF à tout dividende versé au conjoint, aussi longtemps que le montant ne dépasse pas la somme détenue dans le fonds ? Ou les versements faits au conjoint sont-ils calculés au prorata des revenus de chacun des secteurs, de sorte qu’une partie seulement de chaque dividende est soumise à l’IRF ? Même s’il est raisonnable de penser que la première supposition est la plus juste et la plus vraisemblable des deux, une confirmation de la part de l’ARC serait appréciée.

En dernier lieu, on ne sait toujours pas de quelle manière la décision de l’ARC sera appliquée aux sociétés d’affaires appartenant (séparément) à une même société de portefeuille. Imaginons par exemple que le secteur dédié à la gestion immobilière est exploité sous la forme d’une société d’affaires et qu’il en est de même pour celui dédié à la construction et que ces deux sociétés sont détenues à part entière par une société de portefeuille. Si le conjoint est uniquement actionnaire de la société de portefeuille, les dividendes qui lui sont versés sont-ils admissibles à l’exception des entreprises exclues de l’IRF, aussi longtemps qu’ils ne dépassent pas les bénéfices sous-jacents de la société de gestion immobilière ? Cette dernière devra-t-elle d’abord verser un dividende à la société de portefeuille ? Jusqu’à ce que l’ARC fournisse des éclaircissements, les propriétaires d’entreprises constituées en société seront plus que jamais confrontés à des incertitudes.

Les règles établies dans le cadre de l’IRF peuvent présenter des défis pour les propriétaires d’entreprise. Veuillez prendre contact avec votre conseiller fiscal attitré auprès de Collins Barrow pour obtenir des conseils et trouver, si possible, d’autres exceptions à ces mesures complexes.

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