
Étude de cas : Affectation temporaire d’un employé du Canada aux États-Unis
Le présent article est le premier d’une série de quatre qui examineront les incidences en matière d’impôt sur le revenu canadien et américain lorsqu’un employé d’une entité canadienne est envoyé pour travailler temporairement aux États-Unis. Ce premier article met l’accent sur l’importance de l’établissement de la « résidence » aux fins de l’impôt sur le revenu des particuliers. Les prochains articles traiteront des obligations fiscales des particuliers selon les différentes déterminations de statut de résidence, du concept de péréquation des impôts, des questions relatives à la paie et des questions fiscales des sociétés.
Détermination du statut de résidence canadienne
Le principal facteur déterminant des obligations d’un particulier aux fins de l’impôt canadien est le statut de résidence du particulier. Les particuliers sont assujettis à l’impôt canadien sur leurs revenus mondiaux de toute provenance s’ils sont résidents du Canada ou réputés être résidents du Canada. Les non-résidents du Canada sont généralement imposés uniquement sur leur revenu de source canadienne.
Du fait que le terme « résident » n’est pas défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada, la résidence est une question de faits basés sur la situation particulière de chacun. Toutefois, la jurisprudence canadienne et les pratiques d’évaluation de l’ARC ont évolué pour fournir quelques lignes directrices. Les tribunaux ont généralement conclu que la résidence est établie en fonction du degré d’installation d’une personne en un endroit ou du maintien de son mode de vie habituel en cet endroit. De plus, une personne sera considérée comme établissant une résidence canadienne si la personne « réside habituellement » au Canada, ce qui dépend du fait que le Canada soit l’endroit où la personne, dans sa vie de tous les jours, habite régulièrement, normalement ou habituellement.
Le facteur primordial considéré par l’ARC lors de la détermination du statut de résidence d’un particulier est sa façon de maintenir des liens résidentiels au Canada. Parmi ces liens, les plus importants désignés comme « liens principaux de résidence » sont :
a) un logement (qu’il soit loué ou acheté) que le particulier peut avoir à sa disposition pour ses occupations; et
b) un conjoint ou des personnes à sa charge qui peuvent demeurer au Canada en l’absence de ce particulier du Canada.
En plus des liens principaux de résidence, certains liens secondaires sont également évalués collectivement en effectuant une détermination de statut de résidence. Ces liens secondaires ont trait aux biens personnels au Canada, aux liens sociaux et économiques avec le Canada, à la couverture d’assurance médicale dans une province ou un territoire du Canada, au permis de conduire au Canada, à une résidence saisonnière au Canada, à un passeport canadien ou à un statut d’immigrant reçu et à des affiliations à des associations professionnelles canadiennes. Aucun lien résidentiel secondaire individuel n’est suffisant en soi pour déterminer le statut de résidence.
Lorsqu’il est établi qu’un particulier n’a pas coupé tous ses liens résidentiels avec le Canada, l’ARC considérera également les facteurs suivants pour évaluer l’importance de ces liens :
a) Preuve de l’intention de rompre définitivement les liens résidentiels – L’ARC a indiqué que le séjour à l’étranger d’un particulier doit être caractérisé par une certaine permanence. Bien que la durée du séjour à l’étranger soit un facteur, il n’y a pas de durée particulière qui entraîne nécessairement qu’un particulier devienne un non-résident. En règle générale, lorsqu’il existe une preuve que le retour du particulier au Canada était prévu au moment du départ, l’ARC attachera plus d’importance aux liens résidentiels restants au Canada pour établir que le particulier continue d’être un résident de fait au Canada.
b) Régularité et durée des visites au Canada – Lorsqu’un particulier rompt définitivement tous ses liens au Canada, des visites occasionnelles au Canada n’auront aucune incidence sur le statut de résidence du particulier. Toutefois, lorsque les visites sont plus qu’occasionnelles, et sont même de nature régulière, et que le particulier a maintenu des liens résidentiels secondaires avec le Canada, ces visites régulières ou plus longues serviront à évaluer l’importance des liens restants.
c) Liens résidentiels en dehors du Canada – En plus de rompre les liens résidentiels canadiens, il est important qu’un particulier établisse des liens résidentiels dans le nouveau pays de domicile. L’acquisition d’une résidence dans un autre pays réduit l’importance de tout lien résidentiel restant avec le Canada et renforce la présomption que la résidence au Canada a cessé. Toutefois, l’établissement de liens résidentiels à l’extérieur n’implique pas en soi qu’un particulier n’est pas un résident du Canada.
Sur la base des critères mentionnés ci-dessus, la résidence canadienne sera en règle générale considérée avoir cessé lorsque le particulier et sa famille auront déménagé en dehors du pays, auront vendu leur résidence canadienne permanente (selon les circonstances, loué à un tiers sans lien de dépendance peut suffire), auront fermé les comptes bancaires canadiens, changé les adhésions à des associations à un statut de non-résident et rompu d’autres liens résidentiels au Canada. De nouveau, aucun facteur individuel n’est déterminant; tous les facteurs sont évalués collectivement.
Même si la date à laquelle un particulier devient non-résident du Canada est une question de fait, l’ARC la considérera comme la date à laquelle le particulier rompt tous ses liens résidentiels au Canada. Ainsi, cette date sera généralement la plus tardive des suivantes :
a) la date à laquelle le particulier quitte le Canada;
b) la date à laquelle son conjoint et les personnes à sa charge quittent le Canada; et
c) la date à laquelle il devient un résident de l’autre pays.
Lorsqu’un particulier retient des liens résidentiels au Canada au point que le particulier ne peut pas être considéré non-résident, il demeure résident de fait du Canada et est assujetti à l’impôt canadien sur ses revenus mondiaux de toutes provenances. Toutefois, cette détermination de statut résidentiel en vertu du droit national canadien peut être modifiée par un traité fiscal, tel que c’est décrit
ci-dessous.
Détermination du statut de résidence des États-Unis
Les facteurs déterminants importants des obligations fiscales aux États-Unis d’un particulier sont le statut de résidence et la citoyenneté. Les citoyens américains, ainsi que les résidents permanents légaux (tels qu’ils sont définis ci-dessous), sont imposés sur leurs revenus mondiaux de toutes provenances, peu importe où ils vivent. Les non-résidents des États-Unis sont imposés uniquement sur leurs revenus de source américaine. Dans l’année où un particulier qui n’est pas citoyen américain (un « étranger » (alien)) devient résident américain, ce particulier est considéré être un « étranger à double statut » (dual-status alien) (ex. un particulier ayant une période à la fois à titre de résident et de non-résident aux fins de l’impôt aux États-Unis).
Pendant la période à titre de non-résident (ex. avant de déménager aux États-Unis), un particulier est habituellement considéré être un non-résident étranger aux États-Unis. Tel que c’est mentionné ci-haut, les étrangers non-résidents sont tenus de payer de l’impôt américain sur les revenus de source américaine seulement. Les revenus de sources américaines entrent dans deux catégories : ils sont soit « effectivement liés », soit « non effectivement liés » aux États-Unis. Un revenu effectivement lié (qui comprend la rémunération pour services rendus aux États-Unis) est assujetti à l’impôt à des taux fiscaux progressifs. Le revenu non effectivement lié (ex. intérêts, dividendes, rentes, redevances) est assujetti à une retenue d’impôt uniforme. Une fois qu’un particulier devient résident américain, ce particulier est assujetti à l’impôt américain sur les revenus mondiaux de toutes provenances à des taux progressifs.
Un étranger est considéré un résident des États-Unis si le particulier est un résident permanent légal en tout temps pendant l’année civile, ou s’il satisfait aux critères de « présence substantielle » (substantial presence test). Un résident permanent légal des États-Unis est un particulier titulaire d’une carte verte aux fins de l’immigration. Un étranger pourra satisfaire aux critères de présence substantielle si ce particulier :
a) est présent aux États-Unis pendant 31 jours consécutifs durant l’année civile; et
b) est présent aux États-Unis pendant au moins 183 jours durant l’année civile et les deux années immédiatement précédentes selon la formule suivante :
jours durant l’année en cours x 100 %
jours durant l’année immédiatement précédente x 1/3
jours durant la deuxième année précédente x 1/6
Aux fins de ces calculs, les journées partielles aux États-Unis sont traitées comme des journées complètes, excepté pour les voyageurs quotidiens (des exceptions spéciales existent permettant aux journées de trajet quotidien de ne pas être comptées pour ces critères). En règle générale, la période de résidence d’un étranger commence le premier jour de présence aux États-Unis de l’année civile. Toutefois, dans certaines situations, on établira la date du début de résidence aux États-Unis en faisant abstraction des dix premiers jours de présence aux États-Unis si l’on peut prouver que le particulier a des liens plus proches au Canada. Les règles fiscales américaines liées à la résidence pour la première et la dernière année de résidence sont complexes; les faits de chaque cas doivent être examinés pour rendre une décision appropriée.
Résidence en vertu de la convention fiscale Canada-États-Unis
Lorsqu’un particulier est considéré résident des États-Unis aux fins de l’impôt en vertu des règles de résidence aux États-Unis, et qu’il est aussi considéré résident canadien en vertu des règles de résidence au Canada, la résidence aux fins de l’impôt du particulier dans les deux pays est établie en fonction de la clause de résidence incluse dans la Convention fiscale Canada-États-Unis (le Traité). L’article 4 du Traité contient une liste ordonnée de règles décisives en vue de déterminer la résidence aux fins de l’impôt. Si le statut de résidence d’un particulier ne peut pas être établi au moyen du premier critère de règles décisives, le critère suivant est considéré, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le lien soit rompu et que le pays de résidence soit établi. Les règles décisives sont ordonnées comme suit :
- Un particulier est un résident du pays dans lequel il a un foyer d’habitation permanent à sa disposition.
- Si un foyer d’habitation permanent est à la disposition du particulier dans les deux pays, ou dans aucun d’eux, il est considéré être résident du pays où est situé le centre de ses intérêts vitaux (ex. le pays où il a les relations personnelles et économiques les plus étroites).
- Si un centre de ses intérêts vitaux ne peut être établi, le particulier sera réputé être un résident du pays où il séjourne de manière habituelle.
- Si un particulier séjourne de manière habituelle dans les deux pays, ou dans aucun des deux, il est réputé être résident du pays où il est un citoyen.
- Si le particulier est un citoyen des deux pays, ou d’aucun des deux, les autorités compétentes des deux pays doivent trancher la question d’un commun accord.
Si, après considération des règles décisives du Traité, le particulier est jugé être résident des États-Unis, alors, aux fins de l’application des règles du Traité et des règles canadiennes et américaines de l’impôt sur le revenu, le particulier est réputé être non-résident au Canada. En revanche, lorsqu’un particulier demeure résident canadien en vertu du Traité, mais vit et travaille aux États-Unis, le particulier est réputé être non-résident des États-Unis. À quelques exceptions près, les dispositions du Traité ou le droit national peuvent empêcher que le même revenu soit imposé dans les deux pays. En règle générale, le pays où le revenu a été gagné a les premiers droits d’imposition.
Le présent article présente quelques-uns des concepts liés à la résidence aux fins de l’impôt sur le revenu des particuliers canadien et américain. Voyez notre prochain numéro de U.S. Tax Alert pour poursuivre le débat sur l’impact de la détermination du statut de résidence aux fins des déclarations de revenus et obligations de déclaration pour les employés canadiens affectés pour travailler temporairement aux États-Unis. Contactez votre conseiller Collins Barrow pour obtenir de plus amples renseignements.