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4 janvier 2018 par Ryan Kitchen

Les avantages et les inconvénients du revenu céréalier différé

Lors de la présentation du budget fédéral en mars dernier, nombreux sont ceux qui n’ont pas retenu l’annonce d’un programme de consultations visant à déterminer si le gouvernement canadien doit ou non continuer à permettre aux agriculteurs de différer leur revenu céréalier. Cette mesure pourrait avoir un impact significatif sur les exploitations agricoles. Dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement pour favoriser un régime fiscal équitable, ce programme offrait à tous ceux qui étaient concernés par cette question l’occasion de donner leurs points de vue. Parmi les arguments crédibles que l’on pourrait avancer pour approuver ou réprouver l’option de report de revenus céréaliers, ceux qui suivent représentent certainement les points de vue les plus convaincants et les plus répandus.

POUR : Elle permet aux agriculteurs de naviguer au sein d’un secteur volatil

En raison essentiellement de facteurs indépendants de leur volonté, tels que le climat, le prix des produits de base et le financement public, les agriculteurs doivent faire face à un secteur extrêmement volatil. De ce fait, ils éprouvent des difficultés à gérer leurs revenus en l’absence d’un programme permettant de les différer. Lors d’une année record en matière de production agricole, les agriculteurs pourraient être lourdement imposés, tandis qu’une autre année — lorsque la production et les prix sont plus bas — le niveau de leurs revenus chuterait lourdement. En ayant la possibilité de différer leurs revenus, les producteurs agricoles pourraient ainsi les rendre plus uniformes et être imposés d’une manière moins erratique.

CONTRE : Elle pourrait ne plus être pertinente

Du point de vue du gouvernement, le report du revenu céréalier ne semble plus être pertinent puisque la Commission canadienne du blé — qui est à l’origine même de l’introduction de cette option — n’existe plus depuis un certain nombre d’années. Sachant que la Commission du blé était l’acheteur unique de grains inscrits, les agriculteurs n’avaient qu’un contrôle limité sur la vente de leur production. Maintenant que le producteur est seul responsable de la livraison de ses céréales, le gouvernement estime qu’une aide sous forme d’imposition différée a perdu de sa pertinence.

POUR : Elle aide les agriculteurs à prendre les bonnes décisions et à satisfaire la demande en céréales

Le report de leurs revenus céréaliers permet notamment aux agriculteurs de prendre de meilleures décisions et de ne vendre leur production que lorsque les prix sont favorables (au lieu de se précipiter de le faire pour satisfaire leurs obligations fiscales). Les agriculteurs seraient moins enclins à vendre leur grain à la fin de l’année si le programme n’existait pas. Dès lors, on trouverait peu de céréales sur le marché durant les mois d’octobre, novembre et décembre. Il s’ensuivrait ainsi une diminution significative dans le mouvement des produits céréaliers et, par là même, un ralentissement de l’activité ferroviaire. En outre, dès le début de l’année, de nombreux agriculteurs chercheraient à écouler leur production, surchargeant ainsi les réseaux routiers et ferroviaires ainsi que les terminaux céréaliers.

CONTRE : Elle n’encourage pas les agriculteurs à constituer leurs sociétés en corporation

La suppression de l’option de report pourrait pousser un nombre accru d’exploitations agricoles à constituer leurs entreprises en corporation. L’augmentation de leurs impôts rendrait cette option attrayante, car elle permettrait d’atténuer les effets de leurs nouvelles factures fiscales. Pour ceux qui hésitent encore, la suppression de cette disposition est susceptible de les inciter à s’incorporer, un choix bénéfique pour leurs exploitations à bien des égards.

POUR : Elle aide les agriculteurs à éviter les problèmes de trésorerie

En donnant la possibilité aux agriculteurs de réduire leurs factures fiscales, l’option de report leur permet aussi de disposer de plus de liquidités pour couvrir les coûts d’exploitation de leurs entreprises. Supprimer cette option revient à augmenter sensiblement le montant de l’impôt dû et à nuire sensiblement aux flux de trésorerie. Qui plus est, si davantage d’argent va au paiement de l’impôt, les agriculteurs auront de plus en plus de difficultés à financer la prochaine campagne agricole (celle de l’année suivante).

CONTRE : Est-elle injuste envers les autres types d’entreprises ?

Les autres secteurs pourraient penser que l’option de report constitue une politique injuste, puisqu’elle favorise uniquement le domaine agricole. Il est vrai que les agriculteurs doivent surmonter des difficultés particulières, mais il est tout aussi vrai que les employés et les entreprises d’autres secteurs devraient tout autant tirer profit du report d’une partie de leurs revenus à des fins fiscales.

Le programme de consultations mentionné dans la présentation du budget fédéral s’est achevé le 24 juillet 2017. Par la suite, le 6 novembre 2017, le gouvernement a annoncé qu’il avait soigneusement examiné tous les avis reçus dans le cadre de cet exercice et décidé de conserver le traitement fiscal actuel des bons de paiement en espèces différés. Le secteur agricole s’est félicité de cette décision, mais la question pourrait être réexaminée à l’avenir. Si l’option de report de revenus céréaliers venait, à terme, à être supprimée, cela changerait la manière dont les agriculteurs canadiens font des affaires, même s’il existe des moyens de minimiser les effets néfastes d’une telle éventualité. Compte tenu de la volatilité du secteur agricole, seuls continueront à prospérer les agriculteurs qui prendront le temps de prendre des décisions éclairées et responsables.

Ryan Kitchen, B.Comm., CPA, CA, occupe le poste d’associé auprès de Collins Barrow PQ s.r. l. Il fournit des services-conseils en matière d’assurance aux municipalités et des services-conseils en matière de planification fiscale aux particuliers et aux sociétés dans le secteur agricole.

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